Par Jean TROUPEL - 2025 Premier jurat gentilhomme de la ville de Bordeaux. |
Son appel à Versailles pour l'Assemblée des Notables témoigne de son influence et de son engagement dans les affaires politiques de son temps. Ces assemblées étaient des réunions de représentants des différentes classes sociales, convoquées à Versailles par le roi pour discuter des questions importantes, notamment fiscales.
Les conséquences de la Révolution pour la famille d'André Bernard du Hamel ont été nombreuses et significatives :
Perte de fonctions : André Bernard a perdu ses fonctions de lieutenant de maire de Bordeaux en 1790 suite à la suppression du parlement de Bordeaux par décret.
Inscription sur la liste des émigrés : André Bernard a été inscrit sur la liste des émigrés en raison de la possession d'une petite terre à Cenon bien qu'il n'ait jamais quitté la France. Cela a entraîné la mise sous séquestre de ses biens.
Arrestations et emprisonnements : André Bernard et plusieurs membres de sa famille ont été arrêtés et emprisonnés. André Bernard a été emprisonné à La Réole, et d'autres membres de sa famille, y compris sa femme et ses enfants, ont également été arrêtés.
Séquestration des biens : Les biens de la famille ont été mis sous séquestre et loués au profit de la nation. Des scellés ont été posés sur leurs biens et des documents ont été saisis.
Exil : André Bernard a été contraint à l'exil en Espagne en raison de la loi sur les émigrés, bien qu'il ait finalement obtenu la permission de revenir en France sous surveillance.
Santé et décès : André Bernard, âgé et en mauvaise santé, a souffert physiquement des conséquences de la Révolution. Il est décédé le 18 avril 1809 à l'âge de 89 ans dans son château de Castets.
Ces événements montrent les difficultés et les épreuves que la famille d'André Bernard du Hamel a dû traverser pendant la période révolutionnaire.
André Bernard naît à Bordeaux le 12 juin 1720, d'André du Hamel IIème du nom et d'Anne-Marguerite-Thérèse de Barret.
Il se marie en premières noces le 30 novembre 1745 à Guiche (64), avec Marie-Monique de Biaudos. Le 15 janvier 1746 leur naît un fils, André.
Elle ne profite pas longtemps de sa maternité, elle décède à Bayonne le 10 septembre 1746, et est inhumée dans l'église de Guiche (64) le même jour.
Leur fils la rejoindra un an plus tard, il décède chez ses grands parents à Biaudos le 8 septembre 1747.
Le 15 avril 1749, il épouse en secondes noces, en la chapelle de l'évêché de Bayonne, Rose-Marie de la Ferrière.
Vers 1758, Rose-Marie de la Ferrière décède sans postérité.
Le 25 septembre 1758, par acte passé en la même ville de Bayonne, il vend par procureur, ce qui laisse présager qu'il est revenu vers Bordeaux, à Jean Benjamin de Moracin, écuyer, la terre et la baronnie de Ramouzens (Gers, comté de Fézensac).
La considération dont sa famille jouit à Bordeaux depuis son arrivé de Picardie, le fait porter sur la liste des candidats gentilshommes que le conseil municipal de cette ville présente tous les deux ans au roi, et dans laquelle S. M. choisit les jurats d'après les privilèges de Bordeaux. Il est nommé jurat gentilhomme de Bordeaux en 1763.
Le 21 décembre 1765, il contracte, à Bordeaux, un troisième mariage avec Angélique de Brivasac.
Elle meurt sans enfants, le 5 mars 1767, dans sa maison à Bordeaux et est inhumée, le lendemain, dans l'église du couvent des Cordeliers.
En1769, il est reconduit comme jurat gentilhomme de Bordeaux.
Le roi Louis XV en témoignage de sa haute satisfaction, du zèle et des lumières que le vicomte du Hamel a déployé dans les fonctions de premier jurat gentil homme de Bordeaux, l'investit, par lettres patentes du 2 juin 1772, de la lieutenance de maire de cette ville, vacante par la démission du vicomte de Ségur-Cabanac, lieutenant-général des armées du roi.
C'est en cette même année qu'il s'inscrit sur les tableaux d’une loge maçonnique bordelaise. Quelques années plus tard, en 1781, la Française d’Aquitaine, loge issue d’une scission avec la Française, propose au vicomte Duhamel la charge de vénérable d’honneur de cette nouvelle loge. Sa charge de Lieutenant de maire n’interfère pas avec son activité maçonnique qui semble toutefois relativement limitée.
En le faisant son vénérable d’honneur, la Française d’Aquitaine recherche un patronage prestigieux afin d’assurer sa stabilité et sa légitimité sur l’Orient bordelais.
N'ayant point d'enfant vivant de ses trois précédents mariages, il épouse en quatrième noces, sous les qualifications de très haut et très puissant seigneur, vicomte de Castets, baron de Barie et de Lados, lieutenant de maire de la ville de Bordeaux. Un contrat de mariage est signé le 21 mars 1773, au château de Versailles, de l'agrément du roi et en présence de LL.A.RR.(Leurs Altesses Royales) Monsieur le Dauphin et Madame la Dauphine, messeigneurs les comtes de Provence et d'Artois, et des princesses leurs épouses, de mesdames Clotilde et Elisabeth, leurs sœurs, et de mesdames Adélaïde, Victoire et Sophie, leurs tantes paternelles, tous enfants de France, très haute et très puissante dame Guionne-Emilie le Gentil de Paroy, chanoinesse du chapitre noble de Montigny, baptisée le 3 janvier 1754, fille de très haut et très puissant seigneur messire Gui le Gentil, chevalier, marquis de Paroy, lieutenant pour le roi des provinces de Champagne et de Brie, grand-bailli héréditaire des villes et comtés de Provins et Mottereau, chevalier de l'ordre de Saint-Louis, ancien lieutenant au régiment des gardes françaises, et de très-haute et très-puissante dame Louise-Elisabeth de Rigaud de Vaudreuil.
La cérémonie a lieu à Paris, le 23 mars 1773, en l'église Sainte Marie de la Madeleine La Ville L'Evêque, actuelle église de la Madeleine.
Il est si dévoué aux intérêts de sa ville, et met une telle activité désintéressée dans l'exercice de ses fonctions administratives, que les jurats de Bordeaux, pour lui donner un témoignage public de leur attachement, dès qu'ils surent que madame Duhamel allait être délivrée, allèrent lui annoncer la résolution qu'ils avaient prise de faire présenter leur enfant au baptême par la ville de Bordeaux.
Armand-Claude-André-Bordeaux du Hamel, nait le 24 janvier 1774, baptisé le lendemain en l'église métropolitaine et primatiale Saint-André.
On donne à l'enfant le nom de comte d'Ornon, du nom d'une terre située à dix kilomètres de Bordeaux appartenant aux jurats depuis plusieurs siècles. L'enfant fut ensuite ramené chez lui, dans une chaise à porteur escortée de six soldats du guet.
Le titre de comte d'Ornon n'est pas porté longtemps ; le filleul de la ville de Bordeaux meurt le 27 août 1775.
Le couple aura deux autres enfants :
- André Guy Victor du Hamel, nait le 17 janvier 1776 à Bordeaux.
- Louis Joseph voit le jour à Bordeaux le 8 août 1777, il est ondoyé le lendemain en l'église Saint André. Le baptême a lieu à Versailles 10 juin 1781, il a pour parrain le prince Louis Stanislas Xavier de France, Monsieur, frère du roi de France et pour marraine la princesse Marie Joséphine Louise de Savoye, Madame, épouse du parrain.(futurs roi et reine de France, Louis XVIII).
Il se mariera avec Henriette Nicole Antoinette de Chasteigner et embrassera une carrière de haut fonctionnaire, après la révolution.
André Bernard est député, en tant que chef municipal de la ville de Bordeaux, aux Assemblées des Notables en 1787 et en 1788, qui se tiennent à Versailles.Il s'y fit remarquer par ses idées monarchiques.
Etats généraux et Assemblée constituante (1789 – 1791)
Le 5 mai 1789, le roi Louis XVI et Necker ouvrent solennellement les états généraux. Louis XVI n'a plus d'argent en caisse et a besoin de l'accord des représentants des trois ordres (clergé, noblesse et tiers état) pour lever de nouveaux impôts et réformer ceux existants).
Le 17 juin 1789, les députés s'autoproclament Assemblée Nationale puis font serment de ne pas se séparer tant qu'ils n'auront pas donné une constitution à la France.
Ils souhaitent ainsi mettre un terme à l'autoritarisme royal et établir une monarchie parlementaire.
Nous voilà au seuil d'une aire nouvelle.
À Paris, des rumeurs font craindre une intervention des troupes contre la capitale. Le 14 juillet 1789, des émeutiers prennent d'assaut la Bastille, symbole de l'arbitraire royal aux yeux des Parisiens.
Face aux troubles qui s'étendent, le roi reste passif. Son frère, le comte d'Artois, futur Charles X, prend quant à lui la mesure de l'événement et quitte la France sans attendre. Il est suivi dans l'émigration par d'autres nobles.
Le 26 août 1789 est votée la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen. Cette Déclaration de 17 articles commençant par cette phrase mémorable et impensable sous l'Ancien Régime : « Tous les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits... ».
Les journaux se multiplient ainsi que les clubs où débattent avec passion les sans-culottes (on appelle ainsi les gens des quartiers populaires, révolutionnaires intransigeants qui portent un pantalon et non une culotte de soie comme les bourgeois et les aristocrates). Le plus célèbre est le club des Jacobins, dont Robespierre devient président le 31 mars 1790.
Dès les premières années de la Révolution, de nombreux Français quittent clandestinement la France pour les pays d’Europe et d’Amérique, abandonnant leurs biens. Ce sont essentiellement des aristocratiques et des contre-révolutionnaires. Cette émigration volontaire, s’organise autour du Comte d’Artois, avec la ferme intention de rétablir la Monarchie par les armes.
Le 24 avril 1790, la suppression du parlement de Bordeaux est prononcée par décret, André Bernard perd ses fonctions de lieutenant de maire.
Monarchie constitutionnelle et chute de la royauté (1791 – 1792)
Le 21 juin 1791, Louis XVI tente avec sa famille de rejoindre des troupes fidèles afin de rétablir son autorité. Mais il est arrêté à Varennes et ramené à Paris. Dès lors, la ferveur monarchiste des Français commence à s'effriter et nombreux sont ceux à l'accuser de trahison.
Dès l’été 1791, des listes locales de personnes absentes de leur domicile sont dressées, conformément aux dispositions de la loi du 1er juillet 1791. Il s’agit des "Listes des absents " destinées à recenser les propriétaires fonciers absents en vue de confisquer leur patrimoine comme indemnités dues à la Nation.
C'est à partir de cette liste que commenceront les ennuis d'André Bernard.
Homme politique, André Bernard, s'il est apprécié du roi, de ses pairs et de la population bordelaise, l'unanimité n'est pas possible et une personne mal intentionnée, profite qu'il possède une "petite terre" à Cenon quartier Bastide sur la rive droite de la Garonne, où il ne met jamais les pieds, pour l'inscrire sur la liste des émigrés.
Le bien est mis sous séquestre et loué au profit de la nation.
Je ne sais quand et comment André Bernard eut connaissance de son inscription sur la liste des émigrés et de la séquestration de ce bien, mais il envoya une "pétition" au directoire du district de Bordeaux pour obtenir sa radiation de la liste et la main levée sur ce bien.
Le 17 juillet 1791, sur le Champ de Mars, à Paris, les gardes de La Fayette fusillent des républicains qui demandaient la déposition du roi.
Le 1er octobre 1791, la première Constitution française entre en application. Elle inaugure une monarchie constitutionnelle, le pouvoir législatif est confié à une Assemblée du même nom.
Au club des Jacobins s'ouvre un débat sur l'opportunité d'une guerre contre les " despotes " européens. Il va déboucher sur une lutte à mort entre deux clans politiques :
- les Girondins (ainsi nommés parce que leur chef de file et plusieurs d'entre eux viennent du département de la Gironde) : ils veulent sauvegarder les institutions décentralisées mises en place en 1789 ; ils aspirent d'autre part à une guerre qui obligerait le roi à choisir définitivement le camp de la Révolution.
- les Montagnards: ils sont menés par Robespierre, Danton, Saint-Just, Marat... Ils veulent un pouvoir fort et centralisé pour consolider les acquis de la Révolution et à aucun cas d'une guerre. Ils s'appuient sur les sans-culottes parisiens, toujours prêts à déclencher une émeute.
Le 23 mars 1792, Louis XVI appelle les Girondins au gouvernement. Comme le roi, mais pour des raisons opposées, ceux-ci aspirent à la guerre contre l'Autriche. Ils souhaitent exporter les idées révolutionnaires à travers l'Europe ; quant au roi, il souhaite secrètement la défaite des armées françaises afin de rétablir son pouvoir absolu avec l'appui des armées étrangères.
L’Assemblée nationale considérant les émigrés comme des traîtres à la Patrie, vote la loi du 8 avril 1792 sur la confiscation des biens de ceux qui étaient absents du territoire depuis le 1er juillet 1789, biens dont la vente est décidée en septembre de la même année. Une première liste officielle est alors dressée.
L'hostilité envers Louis XVI grandit chez les Parisiens. Le 10 août 1792, la foule envahit les Tuileries et en massacre ses défenseurs. Le roi et sa famille sont alors enfermés dans la prison du Temple. C'est la fin d'une monarchie millénaire !
Le 2 septembre, plus d'un millier de prisonniers soupçonnés d'être monarchistes sont massacrés par les sans-culottes à l'instigation de Marat.
Convention nationale (1792 – 1795)
Après la victoire de Valmy (20 septembre 1792) l'assemblée de la Convention se réunit pour la première fois. Le lendemain, les députés proclament l'abolition de la monarchie et le 22 septembre 1792, ils décident sur une proposition de Georges Danton, que désormais, les actes publics seront datés de « l'An I de la République ».
Les Girondins, adeptes d'un pouvoir décentralisé, auraient souhaité arrêter le cours de la Révolution.
Les députés mettent le roi en accusation. Son procès réveille l'opposition entre les deux clans politiques (les Girondins et les Montagnards.)
Les Montagnards obtiennent la condamnation à mort du roi. Le 21 janvier 1793, Louis XVI est guillotiné en place publique.
Les ennuis commencent
Le document ci-dessous, est le premier du dossier d'émigré d'André Bernard, qui se trouve aux Archives Nationales, site de Pierrefitte, Police générale. Les Émigrés de la Révolution française sous la cote : F/7/5130.
Il s'agit du courrier accompagnant la pétition d'André Bernard, envoyée au Directoire du district et qui la renvoie au receveur des Domaines du bureau de la Bastide avec ses remarques.
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La pétition d'origine, peut- être datée de fin décembre1792, début janvier 1793, n'est pas dans le dossier, mais est bien résumée par le receveur des domaines de Bordeaux.
Transcription : "Aux Citoyens administrateurs du district de Bordeaux Le citoyen André Duhamel, ancien Lieutenant de maire de bordeaux, vous expose qu'il est bien malheureux pour lui que la municipalité de Cenon entre deux mers, veuille le comprendre dans la catégorie des émigrés, et lui appliquer les lois qui ont été promulguées contre ces ennemis de la patrie, dans le temps qu'il s'est toujours comporté en bon citoyen et que soit longtemps avant soit depuis la révolution ni lui ni sa famille n'ont jamais quitté la France, et non cessé d'habiter soit à Bordeaux, et a Castets en Dorthe près Langon ou l'exposant possède la majeure partie des biens, qui compose son patrimoine. Cependant il est arrivé que la municipalité de Cenon dans l'arrondissement de laquelle l'exposant a un petit domaine situé au lieu de Queyries, imaginant que l'exposant était émigre, et le présupposant gratuitement, vient d'affermer ce domaine au profit de la nation. |
Une telle conduite que la loi réprouve, n'a besoin que de vous être dénoncé pour mériter votre improbation et déterminer votre justice à rétablir dans sa propriété dont il n'aurait jamais dû être dépossédé.
Ce considéré
Messieurs, vu le certificat de résidence que l'exposant rapporte à lui délivré par la municipalité de Castets le sept du présent mois de janvier, dument scellé et visé par le directoire du district" (il manque visiblement la fin cette correspondance, mais qui, à la lecture des autres documents, demande la radiation d'André Bernard des listes des émigrés).
Marge :
- Soit communiqué au receveur des Domaines du bureau de la Bastide pour fournir ses observations.
Délibéré à bordeaux en séance publique du Directoire du district
Ouï le procureur syndic le 18 janvier 1793 l'an second de la république
- Le receveur du Domaine au Bureau de Bordeaux qui après communication de la
pétition ci-contre et des certificats y joint, dit qu'il ne peut rien observer sur le contenu de ces pièces les biens qui en font l'objet n'étant pas situé sur l'arrondissement de son Bureau mais bien sur celui de la Bastide.
Bordeaux le 18 janvier 1793 l'an 2ème de la république française
- Le receveur de la régie Nationale au bureau de la Bastide Vu la pétition cy contre et le certificat de résidence y annexé pense que le bail adjugé par le directoire du district le 16 du courant doit être annulé et que les frais dudit bail doivent être à la charge de la nation.
Attendu la résidence du pétitionnaire dans le département de la Gironde. Observé à la Bastide le18 janvier 1793 l'an 2 de la République." La réponse ne tarde pas: le Directoire du département de la Gironde prend un arrêté. Transcription : " Extrait du registre du Directoire du département de la Gironde du 24 janvier 1793 l'an 2 de la république française. |
Vu la pétition du citoyen Duhamel tendant à obtenir la main levée du séquestre apposé sur ses biens, meubles fruits et immeubles qui lui appartiennent situées en la paroisse de Cenon la Bastide et la nullité des baux qui auraient pu en être fait les observatoires du receveur de la caisse du séquestre au bureau de la Bastide, l'avis du district de Bordeaux du 18 janvier présent mois et un certificat de résidence de la municipalité de Castets du 7 janvier 1793 qui demeure déposé au directoire sous la date de ce jour pour y avoir reçu.
Le directoire du Département de la Gironde ouï le Procureur Général syndic :
Considérant que le pétitionnaire à suffisamment justifié que longtemps avant la loi du 8 février 1792 il existait dans le département et qu'il a résidé sans interruption jusqu'au 7 janvier présent mois.
Considérant que par la loi du 20 décembre 1792 les certificats de résidence qui sont déposés antérieurement à ceux qui ne sont pas conforme au mode qu'elle prescrit sont nuls et de nul effet, mais qu'un citoyen qui n'est pas contrevenu aux lois de l'émigration n'en doit pas moins jouir de la liberté de déposer sans entraves de ses propriétés.
Arrête que main levée est faite et donné par ces présentes au citoyen André
Duhamel, de tout séquestre, oppositions qui peuvent avoir été faite sur les biens meubles, fruits, immeubles et à son préjudice tant par la municipalité de Cenon, la Bastide que par toute autre dans l'étendue du département, que tous les baux qui pourraient avoir été faits d'avance de ces dits biens sont nuls et comme non avenus notamment de celui fait par la nation les 6 janvier présent mois, qu'il sera dans le plus brefs délai possible remis en libre paisible entière jouissance pour y être maintenu en possession de tous les objets séquestrés pour raison de son émigration et que son nom et ses biens seront eximés des listes ou ils pourraient être portés à la charge par le pétitionnaire de faire parvenir au directoire du département un certificat de résidence dans la forme prescrite par la loi du 20 décembre 1792 et d'exhiber le présent au directoire du district de Bordeaux pour qu'il veille à sa prompte exécution en outre et que copie du présent arrêté sera envoyé au directoire de la Régie, pour que dans la partie de son adjudication il le fasse exécuter.
Fait en séance publique du Directoire du département de la Gironde
Le 24 janvier mil sept cent quatre vingt treize l'an second de la République française"
La Convention proclame la « patrie en danger » et annonce la levée de 300 000 hommes pour renforcer les armées. Cette mesure entraîne une révolte paysanne dans tout l'ouest de la France. Le 11 mars 1793 débute la guerre de Vendée, la plus impitoyable guerre civile qu'ait connu la France.
Le10 pluviôse an I (29 janvier 1793), le marquis de Paroy et son fils, fuyant Paris où ils sont recherchés, arrivent à Bordeaux chez sa fille et son gendre (Guionne et André Bernard).
Le 8 germinal an I (28 mars 1793) est constitué un Tribunal révolutionnaire pour juger les traîtres à la patrie et les opposants au nouveau régime républicain. Le 17 germinal an I (6 avril 1793), la Convention confie le gouvernement à un Comité de salut public dominé par Maximilien de Robespierre.
C'est le début de la dictature jacobine.
Les 12 prairial et 14 prairial an I (31 mai et 2 juin 1793), 80 000 Parisiens en colère assiègent l'assemblée de la Convention. Il s'agit essentiellement de gardes nationaux en armes.Ils réclament la destitution et l'arrestation des députés girondins groupés autour de Brissot et Vergniaud.
Le 7 messidor an I (25 juin 1793), le marquis De Paroy et son fils sont arrêtés. Ils sont conduits au château de Fort Louis. Le marquis est libéré le 18 messidor an I (6 juillet 1793),son fils doit attendre le 3 thermidor an I (21 juillet 1793).
Pour plus de sureté, la famille Duhamel rentre chez eux, dans leur château de Castets, avec le marquis de Paroy. Ils y arrivent le 13 fructidor an I (30 août 1793) d'après les souvenirs du marquis mais les certificats de résidence d'André Bernard confirment sa présence à Castets à partir du 30 juin 1790.
Le 22 fructidor an I (8 septembre 1793) est célébré le mariage d'André Guy Duhamel, le fils aîné d'André Bernard, avec Marie Victoire Dorothée d'Ornano tous deux âgés de 18 ans, en présence de Guionne et André Bernard, de son frère Louis Joseph, du comte François Marie (prénommé, parfois, et par erreur,Jean Baptiste) d'Ornano, sa belle sœur, Anne de Caupenne d'Etchauz, le marquis de Paroy.
Après la cérémonie, le comte d'Ornano et sa belle sœur, repartent pour Paris, où le comte prévoit de mettre ses affaires en ordre et de regagner la Corse. Avant le terme du voyage, il apprend qu'il est attendu à Paris. Ils font demi-tour et prennent le chemin de Castets.
Quand on apprit à Bordeaux, les événements et la proscription en masse des Girondins, ce ne fut qu'un cri, qu'une protestation ardente et unanime contre les violences dont la Convention venait d’être le théâtre.
Le département de la Gironde devient un des centres principaux de l'insurrection girondine ou fédéraliste. Sur vingt-huit sections, que compte Bordeaux, vingt-sept prennent spontanément les armes pour relever le défi de la Montagne ; une seule, la section Franklin, aurait autorisé par son silence cet attentat inouï à l'inviolabilité de la représentation nationale.
Beaudot et Isabeau sont chargés par le Comité de Salut Public de mater le fédéralisme bordelais et de réduire la ville par la force ou la famine.
Mis en état de siège par les autres sections, la section Franklin ne peut empêcher l'expulsion des représentants en mission, Beaudot et Ysabeau. Chassés au milieu des huées du peuple, les deux députés conventionnels se réfugient à la Réole où accoururent les rejoindre quelques milliers de paysans et de volontaires.
La Réole devient alors le camp de tous les jacobins de la Gironde.
Cette force, en quelque sorte improvisée, dont ils surent tirer le meilleur parti, leur suffit pour couper les communications de Bordeaux et arrêter les subsistances par la Garonne et la Dordogne. Mal défendue et bientôt affamée, la ville s'abandonne, pour ainsi dire, aux vengeances de la Convention, dont les deux commissaires, Tallien et Jullien venu de Paris, la traitent avec la dernière rigueur.
Le25 thermidor an I (12 août 1793 la Convention vote la loi "des suspects", son champ d'application est élargi par le décret du 1 complémentaire an I (17 septembre 1793), qui permet d'arrêter, de "juger" et de guillotiner à peu près n'importe qui.
Sont réputés gens suspects :
- Ceux qui, soit par leur conduite, soit par leurs relations, soit par leurs propos ou leurs écrits, se sont montrés partisans de la tyrannie ou du fédéralisme et ennemis de la liberté ;
- Ceux qui ne pourront pas justifier, de la manière prescrite par le décret du 21 mars dernier, de leurs moyens d'exister et de l'acquit de leurs devoirs civiques ;
- Ceux à qui il a été refusé des certificats de civisme ;
- Les fonctionnaires publics suspendus ou destitués de leurs fonctions par la Convention nationale ou par ses commissaires et non réintégrés notamment ceux qui ont été ou doivent être destitués en vertu de la loi du 14 août dernier ;
- Ceux des ci-devant nobles, ensemble les maris, femmes, pères, mères, fils ou filles, frères ou sœurs, et agents d'émigrés, qui n'ont pas constamment manifesté leur attachement à la Révolution ;
- Ceux qui ont émigré dans l'intervalle du 1er juillet 1789 à la publication de la loi du 8 avril 1792, quoiqu'ils soient rentrés en France dans les délais fixés par cette loi ou précédemment.
La Terreur s'accélère et la guillotine tourne à plein régime. Elle fera, jusqu'à l'exécution de Robespierre, 20 000 victimes environ.
André Bernard tombe doublement sous le coup de cet arrêté, pour être noble et en tant qu'ancien lieutenant de maire destitué et non réintégré et est toujours sur la liste des émigrés de la commune de Cenon.
Le 9 vendémiare an II (30 septembre 1793),il est arrêté au château par le comité de surveillance de Castets et est conduit à La Réole pour y être mis aux arrêts. Il y restera jusqu'à mi-nivôse an II (mi-janvier 1794).
Le 22 vendémiaire an II (13 octobre 1793), le comte d'Ornano est arrêté et conduit à La Réole. Le comité de surveillance de Castets s'interroge aussi sur le sort à réserver au marquis de Paroy.
Le comte d'Ornano est transféré à Paris, à la prison du Luxembourg. Il est jugé le 21 messidor an II (9 juillet 1794), sous le prétexte de la conspiration du Luxembourg, il est guillotiné deux jours plus tard.
Le 15 octobre 1793, Ysabeau et Tallien, députés commissaires, par un courrier aux représentants du peuple dans le département de la Gironde, font un rappel à la loi qui concerne les châteaux fortifiés qui n'a pas été exécuté.
" Qu'il est tems que ces repaires d'aristocratie du haut desquels les soidisant seigneurs insultoient à la misère et à la faiblesse du peuple, disparoissent du sol de la Liberté et de l'Egalité."
Castets n'est pas sur la liste, seuls sont visés les châteaux disposant de moyens défensifs : tours, donjon, pont-levis, douves, c'est pour cette raison que le château de Castets n'a pas été inquiété.
Le 25 vendémiaire an II (16 octobre 1793), c'est au tour de la reine Marie-Antoinette d'être guillotinée. Le lendemain, les Vendéens sont défaits à Cholet. Les Montagnards paraissent triompher.
Le 7 brumaire an II (28 octobre 1793), c'est l'arrestation des autres habitants du château, au seul motif qu'ils sont nobles :
- le citoyen Paroy,
- sa fille Guyonne, femme d'André Bernard,
- les deux garçons de ce dernier, André Guy Victor et Louis Joseph,
- et la fille d'Ornano, femme de d'André Guy Victor.
Seule la belle sœur du comte d'Ornano, Anne de Caupenne d'Etchauz, est épargnée et sera instituée, lors de la pose des scellés sur les meubles du château, dépositaire des clefs desdits meubles.
Les documents suivants sont les comptes rendus du comité de surveillance de Castets.
Ils sont consignés, chronologiquement dans un registre.
. Transcription : (L'auteur a ajouté quelques notes * pour une meilleure compréhension) L'an second de la république française une et indivisible et le quinze octobre mille sept cent quatre vingt treize du matin, nous Joseph Branner aine, Antoine Redeuil, Jacques Mauriac neveu , Andre Dubourg aine, Raymond Garreri, Raymond Foulquiere, Jean Giresse Parrie, Jean Izaute et Jean Nouguey membres du comité de surveillance avec Citoyen Bernard Faugas, Jean Minvielle et Jean Grignon neveu, de la commune de Castets Mazeracreuny renouvelle délibération de laditte commune du treize courant assembles dans la chambre du conseil de la commune de Castets dénombré de neuf premiers nommes, les trois derniers absents quoique convoques. |
Le Citoyen Jean Dubourg aine est comparu et a dit Citoyen je suis chargé avec les Citoyen Troubat et Nouguey de la part du commité que vous avez remplasé, qu'il nous députa cet effet comme étant membres pour nous transporter j(e)udy dernier dix courant (* jeudi 10 octobre 1793) dans le village de la Réolle devant les représentant du peuple quy y était en séance pour leur faire part des opérations dudit commité à prendre leur avis sur le plan de conduite à tenir relativement aux citoyen Ornano et Paroysy devant nobles résident dans cette commune depuis peu de temps, que la multiplicité des afaires dont les représentants du peuple était chargés fut cause qu'on ne peut leur parler que le j(e)udy soir, que le citoyen Ysabo, l'un deux pris le verbal ou registre, et se chargeait dy répondre que samedy dernier. Luy Dubourdieu étant revenu à la Réolle (* samedi 12 octobre 1793) pour prendre cette Réponse et reprendre le dit registre ne peut point xxxxxxx parler de cette journée aux représentants, et qu'ayant xxxxx demeuré jusqu'au dimanche soir il ne peut qu'alors avoir audiance du citoyen yzabo représentant qui luy dit qu'il avait par mégarde embalé le registre avec ses autres papiers et que sur l'observation qu'il luy fit que s'était l'or(i)ginal, il luy a répondu qu'on ne risquet rien que le registre ne ségarerait pas, et que le commité nan avait pas besoin qu'il avait la loy qu'il fallait l'exécuter et qu'il renverait le registre aussytot q'il l'aurait recouvert. Et ledit Dubourdieu s'est retiré. (* le dimanche soir 13 octobre rentre à Castets).
Comité de Castets.
Ensuite le president a pris la parole et a dit Citoyens vous venes d'entendre le raport qu'a fait le citoyen Dubourdieu, mais ce raport ne suffit pas pour vous instruire de ce que le précédent commite avait fait a regard des citoyens d'Ornano et Paroy, et comme j'avais aussy l'avantage d'être president de ce commite, je vais vous faire part de ce que je pense qu'il est utile que vous xxx schachies a cet egart. Le citoyen Paroy fut requis de comparaître devant ledit commite et l'execution de la loy du dix sept septembre dernier relative a l'arestation des gens suspect, il fut interroge pour qu'il eut a faire xxxxxx connaître, 1er quel etait le nombre de ses enfans, s'il avait des freres ou soeurs, et ou étaient leurs résidences actuelle pour scavoir s'ils etait emigres. 2ème ou il avait luy même séjourné depuis le quatorze juillet 1789 jusqu'a ce moment pour scavoir s'il n'était pas dans le cas des émigres rentres en vertu de la loi du huit avril 1792. 3ème Enfin quelles étaient les preuves qu'il avait a nous fournir de son attachement constament manifeste a la révolution. Le citoyen d'Ornano fut aussy interoge et il luy fut fait les mêmes questions, mais les réponses de ces deux citoyens et les preuves dont ils les assortirent ne convinquerent point le commite qu'ils ne fussent dans le cas de l'arrestation en vertu de la loi du dix sept septembre dernier. Mais sur la proposition que je fis a ce commite de prononce de suite ces arrestations ou de consulte les représentant du peuple et de leur faire part de nos opérations, pour leur demander leur avis et un plan de conduite a tenir par ledit commite. Ce dernier party fut adopte. Depuis cette époque et dimanche dernier treize du courant, (13 octobre 1793) les citoyens Ornano a ete mis en arrestation en vertu d'un mandat d'arrêt décerné contre luy par le commite de seurette generale etably a la Reolle. Nous ignorons sy ce commite a la connaissance du verbal adresse par le premier commite de ce lieu avec représentants du peuple, ou sy c'est en vertu de quel quelque autre denonciation dans le premier cas nous ne pouvons connaître quel est le motif quy a peu faire laisser a se comité le citoyen paroya l'écart.
Dans ces circonstances je crois devoir vous proposer devers le commite de seurtte generalle etably et sceant a La Reolle, pour luy demander de voulloir bien nous recevoir a fraterniser avec luy et en conséquence a leur faire part de toutes les démarches que xxxxxxxx nous serons dans le cas de faire dans notre commite et de voulloir nous aider tant en celuyquy se présente au sujet du citoyen paroy, que de tout autre de leurs lumières et s'ils le jugent même a propos de recevoir tout ce dont nous leur feront part comme des dénonciations et se charger des moyens d'execution, ou de nous les renvoyer s'il le trouve plus convenable de cette maniere nous marcherons d'un pas plus assure dans les opérations quy nous sont attribuées, et de cette réunion, qu'il serait a désirer qu'il fut entre tous les commites, il en résultera une liaison et une correspondance de surveillance quy sera certainemant de plus utile pour la surette publique, sy cruellement jalousée par le malintantionne quy cherche a la trouble et a luy porter atteinte. L'assemblée après une discussion a arrette a lune annanimitte que les citoyens Redeuil et Mauriac se transporte aujourd'huy devers le commite de seurette generale de la ville de la Reolle pour l'invite a vouloir bien fraterniser avec le president (du) commite prendre lecture du présent verbal et luy faire part tant pour le cas dont est question que dans tous les autre de leur lumière et adopter les autres voix consilliait mentionnée dans la proposition du president, et fait ledit jour que dessus et an et avons signe
Giresse Brannens Mauriac Yzante Redeuil Foulquier Gazi Dubourg president Nouguey S(ecretaire)
Comité de sureté de Castets Le 13 octobre 1793
Le dixième jour de la première décade du second mois de la deuxième année de la république française une et indivisible nous les membres du commité de surveillance de la commune de Castets assemblé dans le lieu ordinaire de nos séances au nombre de dix Les citoyen Meivielfaugas absent quoique convoqués Le citoyen redeuil a pris la parole et a dit Citoyen vous me députates avec le citoyen mauriac pour notre dernier verbal par nous transporté devers le commité de seuretté généralle étably à la Réolle acceuillie avec ennoncé ainsy que son avis les deux premiers fois que La loy et d'après la connaissance que nous en avons, en faveur de ses quatre individus quant faveur des deux détenus et du citoyen paroy, cependant comme la loy dont je vous ay fait part veut article 4 que les arrestations des gens suspects ne soient prononcées qua la majorité absolue des voix du commité de surveillance vous invite a manifesté votre opinion débarassée de toute considération et dans le seul esprit de la loy pour les arrestation dont il s'agit.
L'assemblée a la lunanimite arrete en execution de la loy le citoyen paroy, sa fille femme au citoyen Duhamel les deux garsons de ce dernier et la fille a Ornano femme au citoyen Duhamel fils aine était sujet a larrestation par leur quallite du cy devant noble, et n'ayant pour eux lexeption portée par la loy d'un attachement constament Manifeste a la révolution, qu'en conséquence il sera par le present commite décerné de suite contre chacun de ceus nommes un mandat d'arrêt quy seront remis au commandant de la force armee pour le mettre a execution, que le scelle sera appose sur les papiers des prévenus au moment de leur arrestation par le président du present commite juge de paix de ce canton assiste du secrétaire du present commite. arrette au surplus que copie du present verbal sera envoyée au commite de seurette generale de la Reolle pour luy faire connaître nos opérations et pour luy servir en cas de réclamation de la part des détenus pour pronnoncer sur lesdites réclamations fait et arrette ledit jour et an que dessus et avons signé
Yzautefaugas Grignon Brannens Redeuil Foulquier Gari Giresse Mauriac Dubourg président Nouguey S(ecretaire)
Le 12 brumaire an II (2 novembre 1793), par arrêté, le département de Gironde porte désormais le nom de Bec d'Ambés. Nom qu'il gardera jusqu'au décret du 25 germinal an III (14 avril 1795).
Le 18 brumaire an II (8 novembre 1793), le comité de surveillance de Castets, en la personne d'André Dubourg, juge de paix du canton, se rend au château pour poser les scellés sur le mobilier susceptible d'abriter des preuves du "mauvais état d'esprit" de ses habitants.
Le 25 brumaire an II (15 novembre 1793), le même André Dubourg, devenu président du comité de surveillance, vient procéder à la levée des scellés et se saisit des documents suspects.
Le 4 frimaire an II (24 novembre 1793), l'assemblée impose un changement de calendrier afin de montrer la rupture définitive avec l'ordre ancien. (Sur certains documents le rédacteur utilise encore le calendrier grégorien en précisant entre parenthèses VS ou en toutes lettres : vieux style)
André Bernard, en prison à La Réole depuis 9 vendémiaire an II (30 septembre 1793), est âgé de 74 ans et n'est pas en bonne santé, à tel point que, mi-janvier 1794, le docteur Deroziers, officier de santé à La Réole, lui diagnostique une fièvre "rémittente" qui dure depuis un mois et obtient son élargissement.
Il passe sa convalescence dans un appartement à La Réole, propriété du "citoyen" Gauzan. Le docteur Deroziers le soigne également pour les "jambes enflées, même considérablement sur le soir" et pour "un rhume de poitrine que la fièvre a continuellement accompagnée".
André-Guy, qui avait été transféré à Bordeaux, envoie depuis la prison une pétition au conseil de surveillance de Bordeaux (je n'ai pas trouvé l'orignal) pour demander la libération de son frère, elle est datée du 17 ventôse an II (7 mars 1794) .
Louis Joseph est libéré le 2 germinal an II (22 mars 1794).
André Bernard regagne Castets le 16 ventôse an II (6 mars 1794) où il restera de manière continue jusqu’au 10 décembre 1796.
Le 3 floréal an II (22 avril 1794), le Comité de surveillance de Castets remet en cause l'arrestation de la famille Duhamel, décision prise par le Comité de surveillance de La Réole.
Il obtient satisfaction et le 15 floréal an II (4 mai 1794), la famille est à nouveau réunie à Castets.
Après avoir fait guillotiner les Girondins, les Montagnards s'entretuent également. Robespierre et le Comité de Salut Public décident de faire exécuter Danton, Camille Desmoulins et leurs partisans car ils sont considérés comme trop indulgents et souhaitent la fin de la Terreur.
Lassés par sa dictature et par la Terreur, de nombreux députés se liguent contre Robespierre et ses proches, comme Saint-Just. Ils sont arrêtés le 9 thermidor an II (27 juillet 1794) et guillotinés le lendemain.
Les vainqueurs de Robespierre, surnommés les « Thermidoriens », libèrent les suspects et mettent fin à la Terreur. C'est le soulagement dans tout le pays. Mais il est de courte durée. Parmi les nouveaux dirigeants, beaucoup (Fouché, Carrier, Barras...) ont outrepassé les consignes officielles et massacré plus que de raison. Ils n'ont abattu Robespierre que pour éviter d'être eux-mêmes abattus. Ils tiennent par-dessus tout à empêcher la restauration de la monarchie qui les priverait de leurs richesses mal acquises, voire de leur liberté ou leur vie.
Les royalistes, majoritaires dans le pays, se prennent à rêver à la restauration d'un roi cependant que le malheureux Louis XVII (le jeune fils de Louis XVI) meurt au Temple le 20 prairial an II (8 juin 1795). Les Jacobins, de leur côté, ne désespèrent pas de revenir au pouvoir.
Dès le lendemain du 10 thermidor an II (28 juillet 1794), les éléments divers, les thermidoriens, dont la réunion momentanée avait si puissamment contribué à la chute de Robespierre, reprennent leur place naturelle, et deux nouveaux partis se trouvent en présence :
Le courant Jacobin,
- proche des comités et des anciens montagnards, et celui des nouveaux modérés naturellement rapprochés des débris de la Gironde et du parti de Danton. Les premiers avaient pour eux les jacobins, les diverses sociétés populaires, et cette classe dévouée et généreuse qu'on appelle le peuple
Le courant royaliste,
- les autres s'appuyèrent sur les gens de la finance, les commerçants, les boutiquiers qui avaient été patriotes jusqu'au moment où la liberté leur avait demandé quelques sacrifices, et ne tardèrent pas à être soutenus les aristocrates ou les contre-révolutionnaires restés en France.
Le directoire (1795 -1799)
Le 5 fructidor an III (22 août 1795), ils mettent en place la Constitution de l’an III, connue sous le nom de Constitution du Directoire, on revient au principe de la séparation des pouvoirs (législatif et exécutif), deux assemblées sont crées, le Conseil des Anciens (250 membres) et le Conseil des Cinq-Cents (500 membres).
Ce Conseil des Anciens vote, le 19 fructidor de l’an V (5 septembre 1797), un texte de loi sur les mesures de salut public contre les émigrés, les prêtres et les royalistes.
En son articles XV : "Tous les individus inscrits sur la liste des émigrés, et non rayés définitivement, sont tenus de sortir du territoire de la république ; savoir, de Paris et de toutes autres communes dont la population est de vingt mil habitants et au-dessus, dans les vingt quatre heures qui suivront la publication de la présente loi ; et dans les quinze jours qui suivront cette même publication, de toutes les autres parties de la République."
Il semblerait qu’André Bernard soit retourné à Bordeaux de la mi-frimaire an V au 29 thermidor an V(mi-décembre 1796 au 16 août 1797) et soit retourné à Castets ou il se trouvait lors de la publication de la loi ci-dessus.
Voilà donc André Bernard, à 77 ans, sur les routes de l’exil. Il passe en Espagne.
Le 8 brumaire an VI (29 octobre 1797), le ministre de la police, Sotin (de la Coindière), en réponse aux nombreuses suppliques (page1, 2) d’un de ses fils, (on ne sait pas lequel), lui accorde une surveillance.
La lecture totale de ce courrier de 3 pages (01, 02, 03) nous en apprend beaucoup sur le fonctionnement de l’administration de l’époque. Elle nous précise qu’André Bernard est toujours en Espagne.
Le 19 brumaire an VI (9 novembre 1797), le commissaire de Directoire exécutif, près de l’Administration départementale de la Gironde, accuse réception au ministre de la police, de sa demande de mise sous la surveillance de l’administration municipale (Castets), d’André Bernard et de cinq autres émigrés.
André Bernard peut entreprendre son voyage de retour pour retrouver sa famille à Castets. Mais son grand âge et son état de santé lui rendent ce retour difficile.
Le 26 frimaire an VI (16 décembre 1797), son état de santé constaté par deux officiers de santé de Bayonne, lui délivre un certificat qui lui permet de faire une demande (page1, 2) auprès de l’administration centrale du département des Basses Pyrénées, afin de pouvoir séjourner à Bayonne le temps de se rétablir, et surtout de justifier son retour tardif à Castets.
Le 4 nivôse an VI (24 décembre 1797), L’administration centrale des Basses Pyrénées envoie leur arrêté au ministre de la police.
Un courrier de son fils du 20 nivôse an VI (9 janvier 1798) au ministre de la police, nous précise qu’André Bernard est en surveillance, depuis deux mois sur ces biens, et réclame justice.
Une nombreuse correspondance, souvent recommandée par l’administration, notamment du Directoire, est échangée avec le ministre de la police, pour obtenir la radiation définitive d’André Bernard de la liste des émigrés.
Ce "combat" commencé en décembre 1792, voit le début de son aboutissement pendant la séance du Directoire exécutif du 3 germinal ans VI (23 mars 1798), lequel arrête la radiation définitive d'émigrés, dont André Bernard. Une note de transmission du ministre de la police porte à la connaissance aux différentes administrations.
Le 12 germinal an VI (1 avril 1798) le liquidateur de la dette des émigrés accuse réception de l'arrêté du Directoire, au ministre de la police.
Le 14 germinal an VI (3 avril 1798) le ministre des finances accuse réception également.
Le 21 germinal an VI (10 avril 1798), le commissaire du Directoire exécutif, près de l'administration centrale de la Gironde, accuse réception également et requière l'enregistrement de cet arrêté.
Voila clos cet épisode, révolutionnaire pour la famille Duhamel. André Bernard décède le 18 avril 1809, à 89 ans, dans son château de Castets.
Bibliographie :
https://www.herodote.net/ :1789-1799 La Révolution française, par André Larané. (Pour le cadre général).
BNF : journal L'Intermédiaire des chercheurs et curieux.
Thèse de Lauriane Cros : Franc-maçonnerie, réseaux maçonniques et dynamiques bordelaises au XVIIIe siècle.
Histoire de la révolution française de M.A. Thiers (onzième édition, tome 6).
Histoire de la Terreur à Bordeaux d'Aurélien Vivie.
Documents pour servir à l'histoire, sous la direction de CH. d'Héricault et G. bord. (Souvenirs de 1792 à 1794, par le marquis de Paroy).
Etat-civil des familles bordelaise avant la révolution, par Pierre Meller.
Archives Nationales à Pierrefitte.
Archives Départementales de Gironde.
Archives Départementales des Pyrénées-Atlantiques.
Avril 2025
Ce sont les premières élections au suffrage universel en France.
Par Monique LAMBERT Pour y aller : Sur la page d’accueil des AD33 en haut à droite, dans la case « Votre recherche » indiquer « Listes électorales 1848 nom de la commune » et OK. 1848, une année qui fait date. En février le roi Louis-Philippe est contraint d’abdiquer. |
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Tout va très vite. Les communes n’ont que quelques semaines pour dresser la liste de ceux qui pourront voter : les hommes de plus de 21 ans qui résident dans la commune depuis plus de six mois, et qui ne sont pas atteints de démence, ni condamnés.
Ce sont ces documents qui sont consultables en ligne. Ceux des communes dépendant des cantons de Belin et La Brède ne sont pas parvenus jusqu’à nous. Quelques lacunes (Castillon-la-Bataille par exemple).
Que trouver dans ce document ? Le nom de tous les hommes qui habitent dans cette commune en 1848. Certaines listes mentionnent non seulement les noms et prénoms des électeurs mais aussi leur domicile, leur métier et parfois leur surnom. D’autres se contentent d’un patronyme parfois sans prénom accolé ou avec pour seule mention : « cadet » ou « aîné » ou « père ». Frustrant.
Les esprits curieux voudront peut-être en savoir un peu plus sur les modalités de ce vote un peu particulier.
C’est au chef-lieu de canton qu’a lieu le vote qui dure deux jours.
Le futur électeur doit parfois se déplacer sur de longues distances. Pas seul. Il chemine avec les autres hommes de la commune.
Les modalités de l’élection : oublions ce qui se pratique de nos jours ! Chaque commune est appelée l’une après l’autre selon un ordre fixé à l’avance. Il n’y a pas d’isoloir. Quand vient son tour, l’électeur remet un bulletin où on peut lire 15 noms, ceux des 15 personnes jugées dignes de représenter le peuple et qu’il souhaite voir élues. Qu’elles habitent la Gironde ou en soient originaires, peu importe.
Le document remis au bureau de vote peut être écrit à la main ou imprimé avec la possibilité de barrer des noms ou d’en rajouter.
Seuls les quinze premiers noms seront pris en compte.
Cette courte campagne semble avoir très active et animée. On peut lire dans deux journaux girondins les professions de foi des candidats (certains se présentent dans plusieurs départements). Elles offrent un aperçu de la vivacité des échanges entre les différents partis. Les « socialistes » et « révolutionnaires » font peur. Les « ouvriers » voudraient bien avoir leur mot à dire.
Les journaux sont-ils le reflet des aspirations des gens de la campagne dont la plupart sont illettrés ? La question reste posée.
Deux journaux consultables en ligne :
- L'Indicateur
https://www.retronews.fr/search#sort=score&publishedBounds=from&indexedBounds=from&tfPublicationsOr%5B0%5D=L'Indicateur%20(Bordeaux)&page=13&searchIn
- Le Mémorial Bordelais
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb328137853/datehttps://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb328137853/date
Quelques témoignages
Le curé de Cadillac 2 V 252
Dans ce document le curé de Cadillac a noté ses réflexions concernant les éléments marquants de la ville de Cadillac et de ses habitants.
Concernant cette période on peut lire :
«1848 - Monsieur le curé commence l'année en visitant tous ses paroissiens de la ville et de la campagne et il n'a qu'à se louer une seconde fois du respect et de l'attachement qu'on lui témoigne.
Le 24 févier une révolution formidable éclate à Paris : le trône de Louis Philippe est renversé et sur les débris est inaugurée la République. Cadillac comme le reste de la France fut saisi d'étonnement et même d'un certain effroi à la nouvelle de ce grand évènement mais cependant il ne perdit rien de sa tranquillité.
Le carême vint quelques jours après, et pendant presque tous les dimanches à l'heure des vêpres, se tinrent sous la halle des assemblées électorales du canton pour les élections à l'Assemblée Nationale constituante qui devaient avoir lieu pour le jour de Pâques, 23 Avril. Des prétendants à la députation vinrent pérorer dans ces réunions. Si quelques-uns se firent remarquer par une honorabilité déjà acquise, et par l'exposition d'idées sagement progressives, le plus grand nombre de ceux qui osèrent élever la voix ne présentaient aucune garantie, d'aucune espèce; c'étaient des ambitieux du plus bas étage et de la pire espèce; heureusement ils n'eurent aucun succès.
Le 23 Avril jour de Paques eurent lieu à Cadillac les élections pour l'assemblée constituante. Toutes les communes du canton furent obligées de venir au chef-lieu déposer leur vote ; elles arrivaient tambour battant. Le maire et le curé en tête, suivis, sur deux longues files et dans le plus grand ordre, de tous les votants.
Pour donner à tous, en ce saint jour, la facilité d'assister à la Ste Messe, il y en eut quatre. La première à cinq heures du matin, la deuxième à huit heures, la troisième à dix heures et la quatrième à onze heures et demie.
Nous n'avons pas besoin de dire combien toutes ces affaires politiques occupèrent les hommes et en empêchèrent un grand nombre de songer aux saints devoirs que l'Eglise impose, en ce temps, à tous ses enfants. »
Un article paru dans l’Indicateur le 24 avril 1848 p 2
La longue marche des électeurs de Macau |
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Quelques mois plus tard. Caricature de Cham |
10/2023
Par Monique Lambert Vous n’êtes pas n’importe qui. Vous avez reçu une bonne éducation et vous arrivez à Bordeaux dans les années 1837. D’un naturel curieux vous voulez connaître la ville. Aussi recherchez-vous un guide qui vous donnera à connaître ce qui doit être vu par les gens de votre position. Cet ouvrage, l’Album du voyageur, correspond à votre attente. Il vous invite à connaître les monuments ou ouvrages remarquables de Bordeaux. |
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Album du voyageur à Bordeaux 1837 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6517190m
L’éditeur, c’est Jean Baptiste Constant. Il est aussi typographe. Il vous propose cent dessins lithographiés accompagnés d’un texte qui « fournit sur l’histoire et la destination de chaque édifice, les détails les plus importants ». L’ordre de présentation lui importe peu. Il précise : « Il convenait mieux de laisser à notre album cette allure capricieuse que l’artiste et le curieux préfèrent toujours dans leurs excursions. »
Qui a rédigé les textes qui accompagnent chaque illustration ? C’est un bon connaisseur de l’histoire de Bordeaux. Discret, Il reste anonyme.
Bonne promenade.
Changeons d’époque et jouons un peu.
Nous sommes dans les années 2020.
D’un naturel curieux vous découvrez l’Album du voyageur paru en 1837.
Certains bâtiments lithographiés sont toujours là, d’autres ont changé de nom, ou de destination. D’autres ont disparu.
Le jeu : comparer la lithographie, le texte qui l’accompagne avec le bâtiment tel qu’il existe aujourd’hui et l’usage qui en est fait ou simplement constater sa disparition.
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Porte Saint Julien | Place de la Victoire |
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Eglise Sainte Croix en 1837 | Sainte Croix de nos jours |
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L'abattoir | Place André Meunier |
Pour vous aider, quelques pistes : Tableau "index" de l'Album du voyageur à Bordeaux 1837 à télécharger >>> ICI <<< (pdf)
Album du voyageur à Bordeaux 1837 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6517190m
Bienvenues aux remarques qui permettraient d’enrichir le tableau !
Note concernant le tableau : La colonne « texte PDF » est la page que présente le document après téléchargement. La colonne « texte » présente la page du texte original. La colonne « illustration PDF » indique la page du document après téléchargement.
Novembre 2021
Par Monique LAMBERT
C’est simple : allez sur Google. Tapez« La Petite Gironde ». Repérez « La petite Gironde » sur Gallica. Vous découvrirez un tableau par année de parution. Cliquez sur l’année recherchée. Un nouveau tableau vous offre de choisir le jour.
Vous serez dirigé sur Retronews. Il ne vous reste plus qu’à consulter le journal.
Les abonnés à Retronews peuvent utiliser la fonction« Recherche avancée » qui permet de repérer sur le journal les mots choisis, alors surlignés en jaune.
Quelques précisions concernant ce journal : https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Petite_Gironde
On trouve de tout dans ce journal, le reflet d’une société qui évolue au fil des ans et de l’actualité. Le monde tel que pouvaient le concevoir et le vivre nos parents et grands-parents girondins. On y trouve de tout : politique, annonces commerciales, spectacles, convois mortuaires, état civil, remises de prix et commémorations diverses etc. Les amoureux des faits divers, crapuleux et sanglants ne seront pas déçus. Emotion garantie.
Vous voulez en savoir plus sur la presse ancienne du département ? Consultez « Villes, villages de la Gironde Presse locale ancienne »
http://presselocaleancienne.bnf.fr/html/villes-33-gironde
Vous trouverez la liste de tous les journaux anciens qui paraissaient en Gironde, avec mention des journaux numérisés. Sont également présentés des journaux nationaux.
Quelques exemples :
« Annonces, affiches, et avis divers.1758-1784. » Vous serez dirigé sur la Bibliothèque de Bordeaux ; Plusieurs titres sont proposés. Ne pas s’attarder sur le premier. Cliquez au choix et savourez.
Des journaux nationaux :
« Gazette nationale ou Le moniteur unversel », organe officiel du gouvernement – 1789 - 1901
16 février 1805
18 mai 1848
« L’Illustration » peut-être partiellement consultée en ligne via wikipedia
12 janvier 1901
Des journaux locaux :
Certains numéros du« Le glaneur », journal de l’arrondissement de Bazas (1835-1944)
12 juillet 1763
ou de « l’Espérance de Blaye » (1836-1904), connotation très religieuse.
8 octobre 1882
etc.
« L’Aquitaine », revue religieuse (1864 -2012) consultable par Gallica
23 janvier 1903
Quelques journaux éphémères comme « Bordeaux-misère » en1890
« La France de Bordeaux et du Sud Ouest » 1887- 1944 quotidien régional , journal du « Bloc des gauches » consultable par Gallica
4 janvier 1943
Un regret : Deux journaux de tendances opposées ne sont pas numérisés : « l’Indicateur » (1804-1862) et le « Mémorial bordelais » (1814-1862). Leur contenu très riche demeure une source d’information incontournable. Une consolation : on trouve mention du lieu où ils peuvent être consultés. Même remarque pour « La liberté du Sud-Ouest » (1909-1944), plus près de nous dans le temps, le journal de l’abbé Bergey, un député très actif.
Bonne lecture
(18/03/2021)