Par Daniel Salmon Le bandit de grand chemin Camalet n'a pas de chance. Ses crimes sont trop graves pour qu'il espère bénéficier de la période trouble de la Révolution. Il est rompu à Bordeaux, place Dauphine (1), le 24 juillet 1789 en même temps que le dénommé Laneau, le frère de sa maitresse. Les bordelais montrent peu de compassion lors de son supplice, tant il leur avait fait peur. Il a été un des derniers roués en France, et sans doute le dernier à Bordeaux. L'arrêt de la Cour du Parlement de Bordeaux, rendu le 12 février 1789, juge et condamne le nommé Camalet, natif de Rabastens en Albigeois, à faire amende honorable. Il sera conduit " tête nue et en chemise, la hart au col, dans un tombereau, au-devant de la porte principale de l'église métropolitaine de Saint André de Bordeaux, où étant à genoux, tenant une torche de cire ardente du poids de deux livres, il demande pardon à Dieu, au Roi et à la justice" (2) L'arrêt du 20 juillet 1789 le condamne au supplice de la roue " à estre rompu vif de six coups de barre de fer qui lui seront donnés par le dit exécuteur ; savoir un coup sur chaque bras, un coup sur chaque cuisse, un coup sur chaque jambe ". (2) |
La mairie de Bordeaux prend alors les mesures de police nécessaires. Le 24 juillet 1789, Camalet et Laneau sont transportés sur un tombereau du Fort du Ha vers la cathédrale. Leur contrition terminée, ils remontent dans la sinistre voiture pour aller place Dauphine où le bourreau les attend. Le ciel est nuageux. Le crime de la rue des andouilles va être expié !
Le crime de la rue des andouilles (3)
La rue des andouilles était située dans le quartier Saint-Michel, à Bordeaux. Elle devait son nom à un charcutier qui s'y était installé à la fin du XVII ° siècle et dont les andouilles étaient fort appréciées dans tout Bordeaux et même au-delà.
Camalet y avait assassiné l'horloger Benoit. Le samedi 7 juillet 1787, Camalet se faisant passer pour un bon bourgeois bordelais achète dans une boutique de la place Dauphine une montre de vingt-cinq louis. Pour le paiement, il persuade le brave Benoit de le suivre dans une belle maison de la rue des Andouilles, qu'il avait louée depuis trois jours.
Avec son complice Laneau, il tue le naïf bijoutier, dans le courant de l'après-midi du 8 juillet. Le cadavre est dépecé. Les deux hommes jettent les morceaux dans la fosse d'aisance. Mais la tête est trop grosse pour passer dans les tuyaux. Camalet et Laneau vont la déposer dans le puits qui sert à alimenter le quartier en eau potable, situé au coin de la rue des Menuts et de la rue du Casse. Une semaine plus tard, les employés d'une boulangerie voisine viennent puiser quelques seaux pour faire leur pain. Horrifiés, ils remontent une tête.
La cavale Impossible de le retrouver. On finit même à Bordeaux, par accuser les jurats d'être complices de Camalet. Un distique moque l'impuissance des juges (11 avril 1789) " Nommez aux Etats Camalet, Montaigne, Villotte et Leydet " (c'est-à-dire le bandit et ses juges). La cavale va durer près de deux ans. Il est finalement arrêté à Marseille. Camalet est " bien garrotté " et veut se laisser mourir de faim. La ville de Bordeaux ne lésine pas et envoie à Marseille des aides major, des brigadiers et des soldats pour le récupérer. Camalet revient à Bordeaux, très surveillé, pour son procès et son supplice. |
Sources et repères
- Aujourd'hui place Gambetta
- Archives départementales. Cote 1 J 61
- La rue des andouilles est aujourd'hui la rue Ulysse Despaux
- Archives municipales. Cotes FF 15 et FF 22.
(*) Archives Municipales de Bordeaux.
(11/2014)