Ce sont les premières élections au suffrage universel en France.
Par Monique LAMBERT Pour y aller : Sur la page d’accueil des AD33 en haut à droite, dans la case « Votre recherche » indiquer « Listes électorales 1848 nom de la commune » et OK. 1848, une année qui fait date. En février le roi Louis-Philippe est contraint d’abdiquer. |
Tout va très vite. Les communes n’ont que quelques semaines pour dresser la liste de ceux qui pourront voter : les hommes de plus de 21 ans qui résident dans la commune depuis plus de six mois, et qui ne sont pas atteints de démence, ni condamnés.
Ce sont ces documents qui sont consultables en ligne. Ceux des communes dépendant des cantons de Belin et La Brède ne sont pas parvenus jusqu’à nous. Quelques lacunes (Castillon-la-Bataille par exemple).
Que trouver dans ce document ? Le nom de tous les hommes qui habitent dans cette commune en 1848. Certaines listes mentionnent non seulement les noms et prénoms des électeurs mais aussi leur domicile, leur métier et parfois leur surnom. D’autres se contentent d’un patronyme parfois sans prénom accolé ou avec pour seule mention : « cadet » ou « aîné » ou « père ». Frustrant.
Les esprits curieux voudront peut-être en savoir un peu plus sur les modalités de ce vote un peu particulier.
C’est au chef-lieu de canton qu’a lieu le vote qui dure deux jours.
Le futur électeur doit parfois se déplacer sur de longues distances. Pas seul. Il chemine avec les autres hommes de la commune.
Les modalités de l’élection : oublions ce qui se pratique de nos jours ! Chaque commune est appelée l’une après l’autre selon un ordre fixé à l’avance. Il n’y a pas d’isoloir. Quand vient son tour, l’électeur remet un bulletin où on peut lire 15 noms, ceux des 15 personnes jugées dignes de représenter le peuple et qu’il souhaite voir élues. Qu’elles habitent la Gironde ou en soient originaires, peu importe.
Le document remis au bureau de vote peut être écrit à la main ou imprimé avec la possibilité de barrer des noms ou d’en rajouter.
Seuls les quinze premiers noms seront pris en compte.
Cette courte campagne semble avoir très active et animée. On peut lire dans deux journaux girondins les professions de foi des candidats (certains se présentent dans plusieurs départements). Elles offrent un aperçu de la vivacité des échanges entre les différents partis. Les « socialistes » et « révolutionnaires » font peur. Les « ouvriers » voudraient bien avoir leur mot à dire.
Les journaux sont-ils le reflet des aspirations des gens de la campagne dont la plupart sont illettrés ? La question reste posée.
Deux journaux consultables en ligne :
- L'Indicateur
https://www.retronews.fr/search#sort=score&publishedBounds=from&indexedBounds=from&tfPublicationsOr%5B0%5D=L'Indicateur%20(Bordeaux)&page=13&searchIn
- Le Mémorial Bordelais
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb328137853/datehttps://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb328137853/date
Quelques témoignages
Le curé de Cadillac 2 V 252
Dans ce document le curé de Cadillac a noté ses réflexions concernant les éléments marquants de la ville de Cadillac et de ses habitants.
Concernant cette période on peut lire :
«1848 - Monsieur le curé commence l'année en visitant tous ses paroissiens de la ville et de la campagne et il n'a qu'à se louer une seconde fois du respect et de l'attachement qu'on lui témoigne.
Le 24 févier une révolution formidable éclate à Paris : le trône de LouisPhilippe est renversé et sur les débris est inaugurée la République. Cadillac comme le reste de la France fut saisi d'étonnement et même d'un certain effroi à la nouvelle de ce grand évènement mais cependant il ne perdit rien de sa tranquillité.
Le carême vint quelques jours après, et pendant presque tous les dimanches à l'heure des vêpres, se tinrent sous la halle des assemblées électorales du canton pour les élections à l'Assemblée Nationale constituante qui devaient avoir lieu pour le jour de Pâques, 23 Avril. Des prétendants à la députation vinrent pérorer dans ces réunions. Si quelques-uns se firent remarquer par une honorabilité déjà acquise, et par l'exposition d'idées sagement progressives, le plus grand nombre de ceux qui osèrent élever la voix ne présentaient aucune garantie, d'aucune espèce; c'étaient des ambitieux du plus bas étage et de la pire espèce; heureusement ils n'eurent aucun succès.
Le 23 Avril jour de Paques eurent lieu à Cadillac les élections pour l'assemblée constituante. Toutes les communes du canton furent obligées de venir au chef-lieu déposer leur vote ; elles arrivaient tambour battant. Lemaire et le curé en tête, suivis, sur deux longues files et dans le plus grand ordre, de tous les votants.
Pour donner à tous, en ce saint jour, la facilité d'assister à la Ste Messe, il y en eut quatre. La première à cinq heures du matin, la deuxième à huit heures, la troisième à dix heures et la quatrième à onze heures et demie.
Nous n'avons pas besoin de dire combien toutes ces affaires politiques occupèrent les hommes et en empêchèrent un grand nombre de songer aux saints devoirs que l'Eglise impose, en ce temps, à tous ses enfants. »
Un article paru dans l’Indicateur le 24 avril 1848 p 2
La longue marche des électeurs de Macau |
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Quelques mois plus tard. Caricature de Cham |
10/2023
Par Monique Lambert Vous n’êtes pas n’importe qui. Vous avez reçu une bonne éducation et vous arrivez à Bordeaux dans les années 1837. D’un naturel curieux vous voulez connaître la ville. Aussi recherchez-vous un guide qui vous donnera à connaître ce qui doit être vu par les gens de votre position. Cet ouvrage, l’Album du voyageur, correspond à votre attente. Il vous invite à connaître les monuments ou ouvrages remarquables de Bordeaux. |
Album du voyageur à Bordeaux 1837 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6517190m
L’éditeur, c’est Jean Baptiste Constant. Il est aussi typographe. Il vous propose cent dessins lithographiés accompagnés d’un texte qui « fournit sur l’histoire et la destination de chaque édifice, les détails les plus importants ». L’ordre de présentation lui importe peu. Il précise : « Il convenait mieux de laisser à notre album cette allure capricieuse que l’artiste et le curieux préfèrent toujours dans leurs excursions. »
Qui a rédigé les textes qui accompagnent chaque illustration ? C’est un bon connaisseur de l’histoire de Bordeaux. Discret, Il reste anonyme.
Bonne promenade.
Changeons d’époque et jouons un peu.
Nous sommes dans les années 2020.
D’un naturel curieux vous découvrez l’Album du voyageur paru en 1837.
Certains bâtiments lithographiés sont toujours là, d’autres ont changé de nom, ou de destination. D’autres ont disparu.
Le jeu : comparer la lithographie, le texte qui l’accompagne avec le bâtiment tel qu’il existe aujourd’hui et l’usage qui en est fait ou simplement constater sa disparition.
Porte Saint Julien | Place de la Victoire |
Eglise Sainte Croix en 1837 | Sainte Croix de nos jours |
L'abattoir | Place André Meunier |
Pour vous aider, quelques pistes : Tableau "index" de l'Album du voyageur à Bordeaux 1837 à télécharger >>> ICI <<< (pdf)
Album du voyageur à Bordeaux 1837 : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6517190m
Bienvenues aux remarques qui permettraient d’enrichir le tableau !
Note concernant le tableau : La colonne « texte PDF » est la page que présente le document après téléchargement. La colonne « texte » présente la page du texte original. La colonne « illustration PDF » indique la page du document après téléchargement.
Novembre 2021
Par Monique LAMBERT
C’est simple : allez sur Google. Tapez« La Petite Gironde ». Repérez « La petite Gironde » sur Gallica. Vous découvrirez un tableau par année de parution. Cliquez sur l’année recherchée. Un nouveau tableau vous offre de choisir le jour.
Vous serez dirigé sur Retronews. Il ne vous reste plus qu’à consulter le journal.
Les abonnés à Retronews peuvent utiliser la fonction« Recherche avancée » qui permet de repérer sur le journal les mots choisis, alors surlignés en jaune.
Quelques précisions concernant ce journal : https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Petite_Gironde
On trouve de tout dans ce journal, le reflet d’une société qui évolue au fil des ans et de l’actualité. Le monde tel que pouvaient le concevoir et le vivre nos parents et grands-parents girondins. On y trouve de tout : politique, annonces commerciales, spectacles, convois mortuaires, état civil, remises de prix et commémorations diverses etc. Les amoureux des faits divers, crapuleux et sanglants ne seront pas déçus. Emotion garantie.
Vous voulez en savoir plus sur la presse ancienne du département ? Consultez « Villes, villages de la Gironde Presse locale ancienne »
http://presselocaleancienne.bnf.fr/html/villes-33-gironde
Vous trouverez la liste de tous les journaux anciens qui paraissaient en Gironde, avec mention des journaux numérisés. Sont également présentés des journaux nationaux.
Quelques exemples :
« Annonces, affiches, et avis divers.1758-1784. » Vous serez dirigé sur la Bibliothèque de Bordeaux ; Plusieurs titres sont proposés. Ne pas s’attarder sur le premier. Cliquez au choix et savourez.
Des journaux nationaux :
« Gazette nationale ou Le moniteur unversel », organe officiel du gouvernement – 1789 - 1901
16 février 1805
18 mai 1848
« L’Illustration » peut-être partiellement consultée en ligne via wikipedia
12 janvier 1901
Des journaux locaux :
Certains numéros du« Le glaneur », journal de l’arrondissement de Bazas (1835-1944)
12 juillet 1763
ou de « l’Espérance de Blaye » (1836-1904), connotation très religieuse.
8 octobre 1882
etc.
« L’Aquitaine », revue religieuse (1864 -2012) consultable par Gallica
23 janvier 1903
Quelques journaux éphémères comme « Bordeaux-misère » en1890
« La France de Bordeaux et du Sud Ouest » 1887- 1944 quotidien régional , journal du « Bloc des gauches » consultable par Gallica
4 janvier 1943
Un regret : Deux journaux de tendances opposées ne sont pas numérisés : « l’Indicateur » (1804-1862) et le « Mémorial bordelais » (1814-1862). Leur contenu très riche demeure une source d’information incontournable. Une consolation : on trouve mention du lieu où ils peuvent être consultés. Même remarque pour « La liberté du Sud-Ouest » (1909-1944), plus près de nous dans le temps, le journal de l’abbé Bergey, un député très actif.
Bonne lecture
(18/03/2021)
Par Monique LAMBERT Demander un acte de naissance, une démarche banale ? Pas à Arsac en ce mois de novembre 1808. HenrySégur (de Ségur), propriétaire se propose de demander un acte de naissance pour un enfant dont la mère, femme de soldat réfractaire, a accouché chez lui. Dans cette intention, il se rend chez le maire non sans avoir pris quelques précautions… |
Bordeaux le 9 9bre 1808
Henry Ségur, propriétaire de la commune d'Arsac à
Monsieur le préfet du département de la Gironde
et Membre de la légion d'honneur
Monsieur le préfet,
La nommée Despraix, épouse du conscrit réfractaire de ce nom, accoucha jeudy hier chez moi, et me pria hier 8 du courant de demander à Mr Bachelot, maire d'Arsac, l'acte de naissance de son enfant, je me présentais chez ce fonctionnaire, comme propriétaire de la maison, le père étant en état d’arrestation ; j'avais avec moi trois témoins, René Desvignes, mon garde-champêtre, Langevin, cordonnier à Arsac et la femme Dugaye, qui tous trois avaient assisté à la rédaction de l'acte de naissance.
La connaissance que j'ai acquise du caractère du Sieur Bachelot rendait cette précaution utile; je lui fis part du motif qui m'amenait chez lui; il paraissait disposé à me satisfaire, lorsque, tout à coup sa femme se précipite comme une furie dans la chambre, et fait passer dans l'âme de son mary le venin que distille sa bouche. En vain j'observais qu'en pareil cas la compagne d'un maire doit se taire, qu'ennemi des mauvais propos et des querelles je n'ai l'habitude n'y d'en tenir n'y d'en souffrire.
Je ne suis point écouté ; j'ajoute qu'elle ferait mieux de se retirer, son mary lui ordonne de rester et partageant à l'instant son délire furibond, il refuse l'acte demandé, et m'enjoint de sortir de chez lui avec mes témoins.
Je vous avoue, monsieur, que sans le respect que je porte au caractère dont les maires sont revêtus, j'aurai à l'instant châtié l'insolence du Sieur Bachelot, mais je seus imposer silence à mon amour propre humilié, je dévorai l'outrage, en imposai à mes témoins indignés et me contentai de les prier de se rappeller cette femme mal'honnêtte pour en retracer à vos yeux, si besoin est, les détails scandaleux.
Je vous épargne, Monsieur le préfet, le récit des termes indécents dont s'est servi le sieur Bachelot, vous n'avez pas l'habitude d'en entendre de pareils, et je ne veux pas commander votre indignation ; je veux seulement faire un appel à votre justice, je me la seroit faitte déjà peut êttre, si j'avais connu l'interdiction dont vous avez frappé le maire d'Arsac.
Vous ne souffrirez pas, Monsieur, que les honnêtes gens d'Arsac gémissent plus longtemps sous la verge de fer du Sieur Bachelot, qu'il mette plus longtemps sa volonté à la place des lois et que ce maire dispose à son gré de la réputation des hommes honnêtes qu'il devrait protéger au lieu de les insulter.
Je pourois, Monsieur, profittant de la circonstance m'ériger en dénonciateur, mais ce rôle ne me convient point, je pourois, remontant des époques, heureusement éloignées, lever le voile qui cache la conduite du Sieur Bachelot à mon égard, je pourois vous désigner certains particuliers qui, foulant aux pieds les lois du gouvernement relative à la conscription, vivent tranquilement à Arsac à l'ombre du silence protecteur du Sieur Bachelot,
je laisse au temps à vous faire connoittre le degré de confiance qu'on doit lui accorder, et à votre sagesse le soin de me rendre la justice que je dois attendre de vos manières et de votre impartialité.
Si je me suis décidé, Monsieur, à vous renddre compte des faits qui se sont passés hier à Arsac, c'est qu'après nous avoir chassé de sa maison, le sieur Bachelot rouvrit sa porte pour me dire d'un air triomphant (et je vous rapporte ses expressions) « allez au Département, vous y vérrez le paquet que j'y ait porté contre vous ».
Je scais 'avance ce que vous pourez penser Monsieur des calomnies du Sieur Bachelot, calomnies fabriquées, vraisemblablement par luy et un de ses collègues, échappé, heureusement pour luy, à la justice du tribunal criminel devant lequel je l'ai fait comparoittre il y a quelques années mais je suis tranquile parce que ma conscience ne me repproche rien.
Daignez, Monsieur le préfet, ordonner à l'adjoint de la commune d'Arsac de me délivrer l'acte de naissance que j'ai réclamé vainement hier et êttre bien convaincu des sentiments respectueux avec lesquels j'ai l'honneur d'êttre
Monsieur le préfet
Votre humble et obéissant serviteur
Henry Ségur
Le Sieur Bachelot malgré sa suspension exerce toujours ses fonctions et a fait hier 8, le mariage de la fille du nommé Jérémie Segonnes habitanted'Arsac avec le nommé Gondat de Cantenac.
ADG 2 R 285
Quelques jours plus tard, c’est Henry Ségur qui officie comme maire d’Arsac.