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Ce sont les premières élections au suffrage universel en France.

Par Monique LAMBERT
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Pour y aller : Sur la page d’accueil des AD33 en haut à droite, dans la case « Votre recherche » indiquer « Listes électorales 1848 nom de la commune » et OK.

1848, une année qui fait date. En février le roi Louis-Philippe est contraint d’abdiquer.
Alphonse de Lamartine et des révolutionnaires parisiens proclament la deuxième République. Et très vite ce gouvernement provisoire prend plusieurs mesures. Dont en date du 5 mars 1848 un décret qui proclame le suffrage universel direct masculin. Sous la Restauration ou la Monarchie de Juillet seuls ceux qui payaient un certain montant d’impôts pouvaient voter.
Pour la première fois tous les hommes sont appelés à s’exprimer par les urnes. Il s’agit d’élire les députés d’une Assemblée nationale constituante.
Le vote est prévu les 23 et 24 avril. La Gironde doit envoyer 15 députés pour une assemblée qui en comptera 900.

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Tout va très vite. Les communes n’ont que quelques semaines pour dresser la liste de ceux qui pourront voter : les hommes de plus de 21 ans qui résident dans la commune depuis plus de six mois, et qui ne sont pas atteints de démence, ni condamnés.
Ce sont ces documents qui sont consultables en ligne. Ceux des communes dépendant des cantons de Belin et La Brède ne sont pas parvenus jusqu’à nous. Quelques lacunes (Castillon-la-Bataille par exemple).
Que trouver dans ce document ? Le nom de tous les hommes qui habitent dans cette commune en 1848. Certaines listes mentionnent non seulement les noms et prénoms des électeurs mais aussi leur domicile, leur métier et parfois leur surnom. D’autres se contentent d’un patronyme parfois sans prénom accolé ou avec pour seule mention : « cadet » ou « aîné » ou « père ». Frustrant.

Les esprits curieux voudront peut-être en savoir un peu plus sur les modalités de ce vote un peu particulier.

C’est au chef-lieu de canton qu’a lieu le vote qui dure deux jours.
Le futur électeur doit parfois se déplacer sur de longues distances. Pas seul. Il chemine avec les autres hommes de la commune.
Les modalités de l’élection : oublions ce qui se pratique de nos jours ! Chaque commune est appelée l’une après l’autre selon un ordre fixé à l’avance. Il n’y a pas d’isoloir. Quand vient son tour, l’électeur remet un bulletin où on peut lire 15 noms, ceux des 15 personnes jugées dignes de représenter le peuple et qu’il souhaite voir élues. Qu’elles habitent la Gironde ou en soient originaires, peu importe.
Le document remis au bureau de vote peut être écrit à la main ou imprimé avec la possibilité de barrer des noms ou d’en rajouter.
Seuls les quinze premiers noms seront pris en compte.

Cette courte campagne semble avoir très active et animée. On peut lire dans deux journaux girondins les professions de foi des candidats (certains se présentent dans plusieurs départements). Elles offrent un aperçu de la vivacité des échanges entre les différents partis. Les « socialistes » et « révolutionnaires » font peur. Les « ouvriers » voudraient bien avoir leur mot à dire.
Les journaux sont-ils le reflet des aspirations des gens de la campagne dont la plupart sont illettrés ? La question reste posée.

Deux journaux consultables en ligne :

- L'Indicateur
https://www.retronews.fr/search#sort=score&publishedBounds=from&indexedBounds=from&tfPublicationsOr%5B0%5D=L'Indicateur%20(Bordeaux)&page=13&searchIn
- Le Mémorial Bordelais
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb328137853/datehttps://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb328137853/date

Quelques témoignages

Le curé de Cadillac 2 V 252
Dans ce document le curé de Cadillac a noté ses réflexions concernant les éléments marquants de la ville de Cadillac et de ses habitants.
Concernant cette période on peut lire :
«1848 - Monsieur le curé commence l'année en visitant tous ses paroissiens de la ville et de la campagne et il n'a qu'à se louer une seconde fois du respect et de l'attachement qu'on lui témoigne.
Le 24 févier une révolution formidable éclate à Paris : le trône de LouisPhilippe est renversé et sur les débris est inaugurée la République. Cadillac comme le reste de la France fut saisi d'étonnement et même d'un certain effroi à la nouvelle de ce grand évènement mais cependant il ne perdit rien de sa tranquillité.
Le carême vint quelques jours après, et pendant presque tous les dimanches à l'heure des vêpres, se tinrent sous la halle des assemblées électorales du canton pour les élections à l'Assemblée Nationale constituante qui devaient avoir lieu pour le jour de Pâques, 23 Avril. Des prétendants à la députation vinrent pérorer dans ces réunions. Si quelques-uns se firent remarquer par une honorabilité déjà acquise, et par l'exposition d'idées sagement progressives, le plus grand nombre de ceux qui osèrent élever la voix ne présentaient aucune garantie, d'aucune espèce; c'étaient des ambitieux du plus bas étage et de la pire espèce; heureusement ils n'eurent aucun succès.
Le 23 Avril jour de Paques eurent lieu à Cadillac les élections pour l'assemblée constituante. Toutes les communes du canton furent obligées de venir au chef-lieu déposer leur vote ; elles arrivaient tambour battant. Lemaire et le curé en tête, suivis, sur deux longues files et dans le plus grand ordre, de tous les votants. 
Pour donner à tous, en ce saint jour, la facilité d'assister à la Ste Messe, il y en eut quatre. La première à cinq heures du matin, la deuxième à huit heures, la troisième à dix heures et la quatrième à onze heures et demie.
Nous n'avons pas besoin de dire combien toutes ces affaires politiques occupèrent les hommes et en empêchèrent un grand nombre de songer aux saints devoirs que l'Eglise impose, en ce temps, à tous ses enfants.
 »

Un article paru dans l’Indicateur le 24 avril 1848 p 2

 

 La longue marche des électeurs de Macau

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listeselectorales1948 05 Quelques mois plus tard. Caricature de Cham

10/2023