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Par M. Lambert

Un débat actuel : la place de l’animal dans ses relations avec l’homme. Des réflexions tant philosophiques qu’anthropologiques. Un document dès 1854 suggère la prise en compte de la souffrance animale.Dernièrement, le 30 octobre 2014, en deuxième lecture, les députés ont reconnu aux animaux la qualité « d’êtres vivants doués de sensibilité ». Ils étaient considérés jusqu’alors comme des « biens meubles ».
L’attention portée à la souffrance animale n’est pas nouvelle.On peut trouver aux AD 33 sous la cote 4 M 224, au milieu de feuillets ayant trait aux activités de la police un document un peu particulier. Il date de 1854. Il s’agit d’une réponse du Tribunal de Bordeaux à une question posée par le commissaire de police.

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Elle concerne les pratiques des garçons bouchers à l’abattoir de Bordeaux.
Rien n’indique quels faits ou circonstances ont motivé la démarche du commissaire auprès du Tribunal

Question : Doit-on verbaliser et provoquer l'application de la loi du 2 juillet 1850 contre les garçons bouchers qui, dans l'intérieur de l'abattoir, portent des coups d'instruments tranchants aux animaux destinés à être abattus, leur font ainsi des blessures qui répandent du sang et donnent ainsi des preuves de barbarie inutile ?

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Il est fait mention de la loi du 2 juillet 1850 :
« Seront punis d'une amende de cinq à quinze francs, et pourront l'être d'un à cinq jours de prison, ceux qui auront exercé publiquement et abusivement des mauvais traitements envers les animaux domestiques ».
A l’origine de cette disposition : le général Jacques-Philippe Delmas de Grammont (1796- 1862). La Société Protectrice des animaux existait déjà. Elle avait été créée en 1845 par le docteur Etienne Pariset.La réponse du président du Tribunal, toute en nuances, figure en annexe.
On peut y noter que les animaux destinés à l’abattage sont considérés comme des « animaux domestiques ».
Il est avancé que c’est moins l’intérêt des animaux que le législateur avait en vue que l’humanité et la morale publique, l’adoucissement des mœurs.

L’abattoir peut-il être rangé dans la catégorie des « lieux publics » ? C’est un point important car le texte de loi précise que les mauvais traitements ne sont punissables qu’exercés publiquement. Or l’abattoir de Bordeaux, édifice municipal, accessible à tous ceux qui veulent y pénétrer, est considéré comme un « lieu public ».
Il est préconisé de la part du maire un arrêté qui préviendra les habitués de l’abattoir que l’on sévira désormais contre eux à l’occasion des mauvais traitements infligés aux animaux.

Les animaux ont-ils bénéficié de traitements propres à préserver leur souffrance ? On ne sait.

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Abattoir de Bordeaux vers 1900.
Sur l'emplacement de l'actuelle place André-Meunier

Pour en savoir plus :

Baratay (Eric), Le point de vue animal, Paris, Le Seuil, 2012


(11/2014)